Je me suis toujours posé la même question, que faire de ma vie ? Je veux dire, que faire de bien, longtemps, et avec plaisir ? Ce n'est pas bien clair. Que faire de bien qui puisse me plaire et plaire à ceux qui regardent ? Bon, ça donne des pistes, mais pas encore assez clair à mes yeux rougis d'écran. Que faire de bien, mais mieux, que faire de soi, non, comment poser la bonne question pour avoir la réponse que j'ai déjà ? Oui ?
L'idée c'est de réussir avant la fin, de commencer quelque chose qui fluidifie les nerfs et développe le doux. Genre. Les jeunes filles disent beaucoup genre. C'est une interjection. Les jeunes filles... Certaines jeunes filles. Je n'ai pas fait d'étude sociologique. L'idée c'est de me demander ce que je dois faire pour que ça me plaise assez longtemps pendant que je le fais. Le spectacle n'est pas exclu mais je trouve ça fatiguant, c'est pourquoi la vidéo (185) me semble plus légère.
Raconter comment on se débrouille pour vivre, voilà, comment je me débrouille pour réussir à mettre un pied devant l'autre pour tenter de marcher. Le repos est nécessaire, je vais me coucher. Disons. L'envie est forte de décupler une manière de faire, douce, qui déploie ses ailes et couvre le soleil pour faire de l'ombre au méditant. Quel drôle de mot méditant. Que font les méditants ? Ils méditent. Mais encore ? Ils plient les genoux. Mais encore ? Ils tentent pour la plupart de ne pas penser à la jolie fille en face, ou l'heure du repas, ou la prochaine sieste, ou que sais-je encore... Ils sont pour la plupart surpris de se retrouver au milieu d'un groupe de gens qui ne font rien de bien précis (ou le contraire) et qui, assis sur des gros coussins noirs, tentent de chasser les mouches sans mouvement de nez devant le maître qui s'est endormi ou fait semblant. Après tout il fait ce qu'il veut, il a trouvé la bonne question, lui. Master ? Vous êtes mort ?
Comment faire pour faire bien, le truc qui me plaise à faire, sans être obligé de montrer, sans être obligé de rendre compte, sans être obligé de se mettre en avant pour une statuette, pour un pin's, pour une médaille, pour un sucre, pour une caresse. Il y a bien des façons de se détacher de l'environnement toxique du capital, gagner sa vie peut passer par un courant alternatif. Cependant.
Cependant, lorsqu'on atteint un certain niveau de mollesse, on se demande si les humains pourvoyeurs de prix n'ont pas créé des challenges pour encourager les artistes à développer un esprit de compétition digne d'un cycliste tireur nageur coiffeur chauffeur apte au pentathlon inversé de l'école du cheveux de Budapest. Je ne sais pas pourquoi cette ville, laissez-moi rêver un peu.
Comment montrer comme d'autres en leur temps (Lequel ? Mais lequel ?! Parle traître ! Dis-moi où est caché la carte ! Tu l'as mangée ? Recrache !) qu'il est possible de laisser derrière soi, ou devant soi, un équilibre fragile de boules en l'air prêtes à tomber sans tomber et repartir aux cieux, repues d'air et de gravité, pour finir enfin sur un sol béton ciré d'une école de cirque moderne qui a compris que la performance n'est pas le résultat nécessaire pour provoquer un applaudissement nourri. Se casser la gueule avec grâce peut provoquer des remous divers.
Quand faut-il s'arrêter de croire en soi ? Où commencer à croire en soi ? Le lieu est-il important, un aéroport peut-il convenir, une gare, une médiathèque ? Ne serait-il pas plutôt utile de cesser de croire qu'il faut croire et se lancer à l'aventure sans plan ? Tu veux un peu de limonade pour faire passer l'éternuement gazeux ?
Je suis trop malin pour me faire avaler (et même de travers) que je ne veux pas réussir quelque chose de plus grand que moi et que, non vraiment, j'abandonne, partez sans moi, je finirais ici au milieu des bruyères, je ne mettrais pas à jour mon site Internet, désuet et brouillon dont les déroulés attendent une unité plus forte, une présence plus fluide, une cohésion d'images qui ne permettent pas de doute quant à ce qu'il propose, on comprend du premier coup, la foule est en liesse, dégommant sans haine la profusion imagière et textuelle délétère et superfétatoire, agrandie d'un coup d'un seul par un minislide efficace qu'on ose même pas scroller sur son smartphoque de peur que la glace s'écroule.
Les réponses ça n'a jamais été mon fort Saganne, je suis un môme des années 80, et quand je me promène du côté du Panthéon, je ne reconnais plus les vigiles qui demandent des cartes et des pass dans les bibliothèques de ma jeunesse où l'on entrait pour consulter des trucs sans avoir à montrer son œil au scanner pour être sûr qu'on étudie la parapsychologie et qu'on peut emprunter, ou du moins consulter le De Vermiis Mysteriis, qui permettra certainement de faire un bon plat irlandais à base de viande de bœuf, de champignons et de pâte croustillante à casser à la cuillère pour laisser s'échapper la fumée qui brûle la langue si l'on n'y prend garde. À moins que ce ne soit du mouton sauvage, et j'en tremble à l'idée qu'il bêle bêle bêle comme le jour.
J'ai encore dû choper une carie en haut à gauche sur ma trente troisième dent surnuméraire, avec toutes ces émotions et voyages ça ne m'étonne pas. Je ne sais pas où elle se loge (dans ma bouche, ah bravo, je ne vous félicite pas) je me demande si je vais devoir refaire une radio. Si seulement je pouvais passer des disques.