jeudi 30 janvier 2025

141.Supersceptique.

  45 pages par semaine de dessins, mon mag perso private joke, des trucs divers et variés, ce serait pas mal. Gribouiller, délirer, dire des impossibles blagues, mais pas les mettre en ligne parce que j'ai envie de vivre en bonne santé et de garder mes dents, ou alors je fais des diversions, ou je redessine le dessin, je sais pas. Collégialement débuter avec son équipe de tête, faire des réunions, recoudre mon blouson rouge (c'est à cause de la fermeture éclair qui s'est pétée) enlever mes baskets rouges (aussi, tiens) décroiser les jambes, enlever également ce casque sur mes oreilles qui ne diffuse rien du tout.
  Bon, je reprends. J'ai pas réussi à me concentrer sur le premier texte parce que fallait sortir le petit chien qui déconne après les croquettes. Elle voulait pas faire pipi, juste sortir. Des fois je la fais courir, mais je fais gaffe parce qu'elle se met en travers et je chute.
  J'ai des films à voir, le Procès de Orson Welles de Franz Kafka, le Fabelmans de Spielberg parce que je sais pas, ça me donne plutôt envie de revoir les Indiana Jones, les 3 premiers, les seuls. La suite je n'y crois plus. Dans le 5 (le 4 je n'en parle même pas) il est vieux et en slip avec une batte de base-ball et du brandy dans son kawa. Le Indy 5 avait une intro de fou, mais après c'est parti en saucisse. Peut-être je vieillis, mais j'accepte plus qu'on tue des gens pour rien pour montrer que les méchants sont des méchants. Un méchant qui tue, c'est ok, on a besoin de savoir que tu es méchant, mais en même temps je me dis, et si on montrait un méchant vraiment méchant qui tue pas ? Je suis un foldingo.
  Les idées font un symposium, j'espère commencer à repeindre des trucs, pas forcément sur de la toile, des bouts de papiers, des bouts de tissus déchirés je sais pas. Je sens que je vais pas aller à Angoulême encore cette fois, dimanche y'a un pote qui fait un spectacle l'après-midi, je vais y aller. Avec Aurélia peut-être. La semaine prochaine s'il pleut moins j'irais voir mon vieux. Le courage du volant. J'aime pas aller là-bas. Pas que je veuille pas le voir, le trajet est trop plein de gens qui roulent et je me pose toujours la même question, mais pourquoi qu'on roule ? On est trop nombreux, on devrait pas rouler autant. Qui va où pourquoi faire, est-ce que c'est plus important que moi ? Pas que je me mette en avant, juste je m'interroge surprise. Le bruit, le vroum, la fumée, à quoi qu'on joue ? La plus grosse quéquette, la plus grosse tuture. Il serait si doux que notre monde ait axé ses motivations sur le livre qui va, se promène et voyage. Bibliobus autorisé, avec des bêtes au pas qui tirent le bus, à moins qu'on fasse pédaler dessous des anciens riches, des gnomes mécaniques ? T'as vu le dernier Wallace et Gromit ? Jamais sur de trop longs trajets assurément. La vie en ces temps sans route nous donnerait des villes plus proches, des raisons d'imaginer plus lentes. Le festival de les lunettes, spatiales et imaginaires, l'audio pour ceux qui voient pu. Pour se défendre des non lecteurs d'ailleurs, on les obligerait à faire des stages à l'imprimerie ancienne, il faudrait les olympiades du plus long mot à mettre à l'envers dans la casse. Tu m'étonnes qui z'étaient fort les intellos.
  Des vendeuses au magasin Brico Brico, plein, toutes assez masculines, costaudes à charrier des planches, elles ont des lunettes, me regardent très doux, des conseils de vis et de mélaminés. Je préfère le stratifié. Vous viendriez un soir chez moi planter une cheville à expansion ? Le magasin de fringues j'ai pas pu. Je suis comme un lapin devant un fusil, comprends pas, je fais bouger les cintres comme un bruit de flipper dans Brice de Nice et je choisis rien. J'ai quand même pris des chaussures premier prix faites par un petit vietnamien, histoire de faire marcher la roue, on y revient.
  J'écoute dans la voiture les chansons des dessins-animés de ma jeunesse à gober des séries, déjà, ça finit sur les feuilletons policiers. Mélanges de disco et de musique du futur qu'on imaginait comment que pourrait être le futur. L'intro des cités d'or, le passage parlé de Goldorak, gros bon trip. J'ai même une ou deux émissions de télé. Enfin Récré A2 ! Les années 80 c'était l'époque où les baguettes faisaient trois fois la taille des baguettes d'aujourd'hui, la farine était peut-être moins pure, y'avait moins de graines, mais ça croustillait sévère. Combien de temps que j'ai pas trouvé une baguette qui croustille et chauffe plus longtemps que le temps qu'elle sorte du four ? Quignon monsieur, quignon madame. Mets ta main dans le toaster tu m'en diras des nouvelles.
  J'envisage l'abolition de la violence en relisant la complète d'Elric de Melniboné, avec son épée buveuse d'âmes qui a buté sa copine parce qu'elle avait faim (l'épée pas la copine, ah merde j'ai spoïlé). 
  Et je me suis toujours demandé, si ton épée obtient de la force (et la redonne) en butant tes ennemis et tes potes, quand l'âme est bien essorée, elle va où ? Au recyclage ? Dans les gros containers à fringues envoyés en Afrique ? On relance un programme essorage ? C'est une vraie question.

mercredi 9 octobre 2024

140.Suppurer l'incongru.

  Nous avons tous des moments de déphasage plus ou moins constants avec le matériel, mais chez certains, c'est presque parfaitement toujours. Ferais-je partie de l'élite ? J'arrive parfois à m'en convaincre, rater la marche est un art à part entière, il suffit de ne pas trop souvent se tordre la cheville gauche pour éviter d'aller regarder le singe au plafond. Comme ça, ça ne veut rien dire mais rassures-toi Christine, je vais expliquer.
  Samedi dernier, mu par un élan de voyageur poussé dehors par le beau temps, j'ai tenté d'aller au festival de BD local pas trop loin en voiture, et c'est avec joie que j'ai fait trois arrêts boites à livres dans des localités inconnues. La boite à livre (avec ou sans s) dénote la mentalité du lieu. Quand elle est pourrie, mal rangée et placée à un endroit minable en proie à la pluie, au soleil ou au vent, ou les trois en même temps, je me dis, bon, c'est pas ici que je viendrais acheter ma ruine. Par contre, lorsqu'elle est bien entretenue et qu'on sent que certains locaux ont fait l'effort de classer les magazines avec les encyclopédies, je me dis, peut-être qu'ici, un bibliothécaire à la retraite prend soin de la cabine téléphonique.
  Mon voyage n'était pas initialement prévu pour des arrêts, mais je ne calcule pas toujours mon calcul, sinon jamais, dés que je sors, je sais que la réalité va me donner un coup de boule alors autant prendre son temps pour voir venir le tractopelle. Et mes loupés n'ont pas loupés.
  J'ai la chanceuse et malchanceuse déconnexion de ce qui m'entoure, me considérant plus petit que ma taille et moins fort que ce que je montre, j'ai une inconscience de moi-même qui frise le génie. Si je veux prendre en photo la drôle d'église, je me prends en reculant, un bitte dans la cuisse. Avec deux t, oui, et pam. Pourquoi cette commune a-t-elle eue l'idée de mettre des plots de bois élevés partout qu'on peut plus faire un demi-tour correct, aucune idée. Les décisions les plus crétines sont souvent motivées par le consensuel. Monique a dit à Martine que les gens se garaient trop sur la pelouse qui en a parlé au maire et sa femme a dit oui. Résultat, obligé de faire cinq cent mètres pour un demi-tour décent sans manœuvrer comme un âne. Bien que personnellement je n'ai jamais vu d'âne conduire un break, même dans les livres de Richard Scarry, c'est vous dire.
  Arrivé au festival de BD, j'ai compris en parlant à une dame bien mise sur elle (le genre de celles qui font des enfants pour pouvoir les ranger dans des boites) réglée comme du papier à musique et si ça dévie d'une note le sourire reste là mais on sent que la hache est dans le coffre, que le festival de BD c'est la semaine prochaine, j'en ai parlé à mon mari pas plus tard que tout à l'heure, ah oui je suis sûre, haha, désolée, haha. Je ne lui ai pas dit que ce n'était pas la peine d'être désolée, elle est partie vroum vroum dans sa grosse auto, droite sur son siège sans arrêter de sourire dans le rétro, et je me suis posé la question de que vais-je faire dés lors dorénavant à partir de ? Le pas qui suit enchaîne souvent l'autre qui vient.
  Ayant vu un homme passer lors de mon palpitant échange, et revenir presque aussi sec avec une baguette sous le bras, je me suis dit, mais oui voilà, je vais aller prendre une baguette. Ce que j'ai fait. À défaut de festival, autant coller des miettes.
  J'ai descendu les marches de la poste/mairie, sans avoir oublié de fouiner dans la boite à livre imitation chalet tout devant, et je suis allé chercher ma baguette. Devant le PMU jouxtant la boulange, j'ai vu de joyeux drilles qui sirotaient le pastis de 11h00 (on était samedi, ça va) et j'ai vite pris ma baguette, et un croissant amandes, et une chocolatine (j'habite le Sud-Ouest) mais pas un pain raisins (dit aussi pain aux raisins mais j'ai habité la Belgique) car pour des raisins, raisons, pardon, d'une mode qui m'échappe, il était farci sur le dessus de grosses boulettes de sucre blanc compactes, et c'est pas possible. Que revienne le temps de la part de flanc à 1euro50 qui nous comblait l'estomac et pesait 500 grammes, oh passé révolu, tout ça.
  Puis en remontant à mon break, j'ai failli me faire écraser par un jeune à casquette qui roule à cinquante musique à fond dans le petit virage derrière la mairie/poste pour se mettre sur le parking musique à fond, alors que franchement c'est pas une route non mais n'importe quoi lui. Je me suis demandé si je devais lui apporter un livre de la boite à livres (on peut mettre un s à livre des fois et laisser boite au singulier, je suis free dans ma tête, c'est quoi le problème ?) pour enrayer son destin de jeune qui roule trop vite en écoutant une musique de merde à fond, mais qui suis-je pour juger et en plus je n'avais pas de bombe anti-agression ce jour-là.
  L'an passé, j'ai descendu une pente en roulé-boulé pour suivre ma chienne, j'en parlais dans les vidéos de l'hiver, peut-être la 115 ou la 117 je ne sais plus, tout ça est si loin, et je me suis tordu le pied, je crois que c'est bien la 115 (qui m'a motivé à quitter la chorale pour commencer vraiment à m'occuper de faire des trucs pour moi après une réflexion pas trop poussée), en me disant ça va, l'angle du pied était bizarre à l'atterrissage, il y a eu un bruit chelou, mais ça va, je peux marcher jusqu'à la maison, en boitant. Et puis en fait non, ça n'allait pas. Et quelques mois plus tard (pourquoi avoir tant attendu, mystère de mon masochisme latent, même si ça va beaucoup mieux merci, je ne le répéterais jamais assez) je me suis tout de même résolu à aller chez mon ostéopathe où quand on s'allonge dos sur la table on voit, collé sur une image au plafond, un chimpanzé souriant qui vous regarde. Ça fait réfléchir.
 
  Quant aux livres potentiels pour supporter la fin du monde, je vous encourage à commencer par Le Nain qui disparaissait, de James P. Blaylock, Bilbo le Hobbit bien sûr, de Tolkien, Les Chroniques de Wildwood, le tome 1 déjà, de Colin Meloy (musicien du groupe les Decemberists, dont les clips sont pas piqués des vers) illustré par sa femme Carson Ellis qui a un instagram qui donne envie d'être un bobo riche de l'Oregon habitant à Portland, et La course au mouton sauvage de Haruki Murakami, parce que. Je vous donnerais d'autres idées au fil des futurs posts afin de sécuriser le périmètre mental de nos vies attaquées de toutes parts par des charençons géants qui ne connaissent pas, hélas, le goût du thé chaud l'après-midi qui, certes, jaunit les dents, mais aide à la digestion du chili sans carne qui nous robore l'esprit autant que l'estomac et c'est pas dommage. Merci Kiki.

lundi 7 octobre 2024

139.Là où je rêve debout.

  L'histoire ne dira pas si je réussirais à mener à bien un de mes nombreux projets, mais elle parlera malgré tout de ma capacité à me souvenir de mes rêves chelous. L'ambition d'un artiste, je ne sais pas, mais la mienne, un peu mieux. Développer un sens de la concentration qui m'amène chaque jour un peu plus à me transformer en œuf dur sur un mur.
  Cette nuit, je tentais de trouver un lieu pour habiter et travailler, je visite quelque chose de délabré mais avec des pièces correctes, pas de chauffage, un peu de plafond, tout à faire. Proche d'un centre ville de petite ville, une ancienne usine peut-être, avec vue sur une grande cour bétonnée, des hangars, des bâtiments plus ou moins en état dont un qui attire mon attention, avec toit en tôle et poteaux troués à la Eiffel, solides, pouvant abriter des avions. Je me dis ça : on pourrait y mettre des avions. 
  Je pense aux avions ronds privés que j'ai vu où déjà ? un cartoon ? Un film de Hitchcok ? La Mort aux trousses ? Et je demande au propriétaire si justement je ne pourrais pas y fabriquer des avions, taille 1 mais en carton, des sculptures quoi ! Plus tard, je revenais dans la pièce habitable, le proprio est parti, pour montrer l'espace à Aurélia, et sur le lit de camp (il y a un lit de camp) un gamin moitié endormi qui me dit qu'il doit rentrer chez lui mais ne sait pas bien comment. Je crois qu'Aurélia n'est pas enchantée par le lieu et s'en va. Il me montre le trajet et je l'accompagne. Arrivé chez lui il va direct se coucher, écrasé de fatigue dans la chambre où, si je pige bien, il dort avec ses deux frères. Dans la salle de bain, je trouve une chasse d'eau bouchée pleine de crottes et de papier cul, et du linge salle humide qui déborde de la cuvette jusqu'à la cabine de douche. J'enlève comme je peux les vêtements salis pour faire un tas à nettoyer et je tire la chasse et, heureusement, ça part dans un tourbillon océanique, qui réveille les trois frangins, dont un ado, qui sortent endormis et en pyjamas de leur chambre, blasés, comme si leurs nuits n'étaient qu'interruptions de sommeil, pour s'installer avec leurs matelas et couvertures dans le salon qui ne donne pas sur la salle de bain. Je leur dis que je les réveillerais pour l'école demain matin (il ne faut pas que l'on s'aperçoive qu'ils n'ont pas de parents à la maison) et je lance une machine avant de cleaner la salle d'eau de fond en comble, tout en me disant que leur journée demain va être un peu rude avec ce sommeil haché.
  Un autre, deux nuits avant, après les frites et les deux bières où selon des sources proches j'ai ronflé un peu fort : mon grand-père venait de mourir et j'avais été mis au courant un peu tardivement, alors que j'habite à côté maintenant, il me fallait vite m'y rendre pour sélectionner quelques affaires m'appartenant avant que les autres (mes oncles) débarquent. Dans la réalité mon père avait fait ça dans le dos de ses frangins, remplissant une remorque d'objets avant tout le monde sans prévenir personne...
  Un dernier que je n'avais pas fait depuis un moment, et qui revient comme un espace de joyeuse panique et me rappelle combien l'organisation de mon départ de l'atelier fut source de montées de glurp... Je retourne rue Bouquière pour un été, j'ai la clef et j'y entrepose mes affaires, beaucoup trop pour changer, pour profiter gratuitement de l'espace et y travailler sans autorisation, je sais que le proprio peut débarquer n'importe quand mais je m'entête, et je sais que je devrais tout virer et faire un déménagement express avant que les guetteurs ne reviennent pour me faire leur rapport. C'est super stressant et je me réveille en me disant que je suis bien débile de m'ajouter du taf en plus, il faut parfois quelques minutes pour être sûr que le déménagement est bien terminé et que je ne reviendrais plus dans la ville honnie.
  Il va y avoir, peut-être, un énorme travail intérieur à réaliser pour tapisser de bleu nuage notre esprit atterré par les nouvelles du monde dans cette humidité compacte de nos bunkers en cours. Je passe ma journée en petits temps sur chaque idée, ça avance mieux comme ça. Mes réveils ces temps-ci, sont calqués sur la pluie, ma vessie me lève avant la catastrophe. Je m'extirpe, rampe, tousse, le sentiment de vivre dans Blade-Runner avec des moutons pas électriques autour. Les livres me sauvent tout en nourrissant mes rêves. J'en ferais une liste dans le post 140 si le temps ne s'améliore pas. Et même s'il s'améliore d'ailleurs. 
  Je risque de vous décevoir, c'est souvent les mêmes.

samedi 5 octobre 2024

138.Le mec plus ultra.

  Comme prévu, je remonte lentement mais sûrement le nombre, le chiffre, des posts de ce blog pour rejoindre ceux de la vidéo de la semaine, et tout sera parfait dans une harmonie qui apportera la paix dans le monde et dans les cœurs blessés du capitalisme galopant plus vite qu'un cheval au galop sur les rives du mont Saint-Michel.
  Bien sûr, la vidéo de la semaine comme qui me suit m'aime, est très en retard sur mon timing. L'automne, nous l'avons vu dans le scandaleux post précédent, a pris le pas de m'empêcher d'aller dehors faire des prises dans le vent et la pluie, et c'est une excuse toute pourrie, tu pourrais parler dans la caméra depuis ton intérieur si fonctionnel et spacieux pour nous ragaillardir de quelques vannes hésitantes dont tu as le secret. 
  N'en jetons plus de casino, je vais m'y remettre, d'ailleurs cet après-midi, je vais me promener dans la campagne, il fait beau, c'est l'occasion.
  En même temps, j'y habite dans la campagne, donc si je sors de chez moi, dois-je dire, je vais automatiquement me promener dans la campagne ou je vais me promener tout court ? C'est délicat à trancher. Je vais me promener marche aussi. Et pourtant beaucoup moins. Je n'aime pas la promenade. Je suis bien obligé parfois, mais je ne vais jamais très loin. Mon genou me fait souffrir, souvenir d'une blessure de la bataille d'Arras, foutu éclat d'obus. Et puis il faut dire que je gamberge un max et les maximonstres. Je réfléchis beau cou, délicatement caressé sur le coin d'un rayon lumineux quand tu rêves à l'avenir glorieux de nos plantes grimpantes.
  Mes arrivées de dossiers sont nombreuses, chaque jour je dépiaute les lettres de fans et tente d'y joindre en retour un petit cadeau, une signature enlevée, une dédicace de mes dernières mémoires, et cela prend du temps. Temps que je ne peux pas utiliser pour me frictionner les cheveux avec un produit supposé empêcher leur chute, et c'est bien fâcheux. Obligé par mes obligations, je trouve encore des excuses pour traîner dans ma loge en fumant des bidis fabriquées par des enfants et tout aussi toxiques sinon plus que les bouteilles d'eau en plastique, à vous dégouter d'être breton. Alors, dans cette étrange mélancolie de gouttes, je vais et viens entre les feuilles où l'on trouve parfois un hérisson rescapé des autoroutes de l'information qui a pris sa retraite au village, pour voir.
  J'ai bon espoir de retrouver la frite. Le bar à côté en sert ce soir, c'est l'occasion. Il s'agirait de synthétiser mes courants pour faire du petit ruisseau un barrage à castors qui fait chier les pégus : "Ah bah y z'ont niqués mes pommiers les dents longues !"... C'est vrai que j'en ai marre des bouses. Bientôt trois ans que je me sers des parts de tartes tatins en kaï, en loucedé, en fignou (j'invente n'importe quoi) devant les trognes hilares du concours de boules d'octobre qui savent que le grand ne fait pas grand chose mais il est artiste, il chantait dans la chorale mais maintenant il fait quoi, allez reprend du rosé Michel, on s'en fout les jeunes, ils sont pas comme nous, y'en a qui votent à gauche.
  Je dis des bêtises, ici les gens sont merveilleux, je pense racheter une ferme qui s'écroule pour en faire une ferme qui s'écroule un peu moins vite que si on la laissait s'écrouler, et concocter un espace de travail pour les animaux réfugiés des chasses en cour. J'ai l'âme à rester en décalage constant, sans vraiment l'avoir choisi, je subis davantage ma manière d'être que je tente de maîtriser dans les règles du bonjour bonsoir ça va et vous et vos projets oh j'en ai plein, pour pouvoir me lancer la tête la première dans le retour sur scène avec un texte tellement fringuant qu'on me demandera comment je fais pour faire aussi bien le cheval.
  Quand vous entendrez la clochez faire, ding, c'est qu'il sera temps de tourner la page.

mercredi 25 septembre 2024

137.L'étendue sereine du meurtrier polyglotte.

  Je sais pas pourquoi j'ai mis ce titre. Peut-être parce que je viens de voir la série Le monde n'existe pas sur Arte tv (avec un Niels Schneider en forme)  du mec qui a aussi fait le film Perdrix, d'ailleurs l'actrice principale de Perdrix elle joue dans la série aussi. Un univers français marrant qui aurait pu durer un peu plus longtemps, brouiller davantage les pistes et moins se répéter, peut-être. Je ne suis pas d'accord avec le critique de Libé qui dit que ça ressemble à un téléfilm policier hexagonal, et puis d'abord quel téléfilm hexagonal ? C'est doux-amer étrange et ça détonne tout en restant ancré dans le réel classique d'un monde qui se cherche encore tant mieux. Un épisode en plus pour développer la tension lentement, faire se rencontrer les fugitifs, diluer le tragique, prendre le temps de l'errance et de la perdition pour une fin plus souple ? J'aime les fins qui finissent bien, non, j'aime les fins qui ne finissent pas.
  Lorsque la brume attaque sévère sur nos nerfs fragiles, et que la pluie froide remplit les puits cachés sous les fondations de l'ancienne mairie où je crèche, je me nourris de ce que je ne connais pas et qui possède un brin de poésie et d’ammoniaque, histoire de remplir mon existence lorsque rien ne sort, rien ne vient, tout s'étonne et le corps cède.
  L'imagerie cérébrale est une connerie limpide, ni cerveau gauche, ni cerveau droit, juste des courants électriques qui voyagent et se touchent, on a des croyances dures. Les chambres résonnent, les liens se font, se fondent, se croisent, se réinventent, se bousculent, se créent et se détruisent dans une anarchie toute ronde. La bile remonte le soir en gorgée de bière avalée de traviole quand tu me parles pour la huitième fois alors que je regarde la série, je tousse, tousse et pleure. Je tousse surtout du désir de vide abyssal nécessaire au plein dans ces journées sans particulière mousse. Faire ce plein, reprendre ma route, sentir le vent dans les cheveux courts, couvrir sa gorge, jeter enfin ces clopes dégueulasses que je me sens toujours dans l'obligation de finir quand je trouve un paquet gratuit abandonné sur un banc.
  Je repense à l'ado que je fus à l'affût du coup qui pleut, maigre et fou sans permis, déconcentré des suites, je ne me fais plus mal pour ça c'est bien. Je le revois ce type d'archétype, pas pressé d'arriver, pas content d'échouer, fâché de tout, n'apprenant rien, peignant juste, à peine, découvrant lentement ce qui fait une vie de recherche, petits tubes d'acryliques, dorés, argentés, magentas, bleus et jaunes primaires, petites toiles formats angelots, papiers d'affiches, avec l'envie d'en découdre, de découvrir un espace secret où l'on me laisse vivre sans bruit (les courriers de papa : attention plus que deux mois et je ne t'aide plus, attention) avec mes jouets plein d'histoires, sans ignorer l'angoisse du monde barbare de l'emploi qui sourd, vivre en équipe, faire sa place dans l'équipe, j'ai pas pu, et pas d'avenir ou de projet autre que tenter de ne pas suivre le chemin merdique de ses parents largués sur le côté de la réussite à tous prix ou de l'hébétude non soignée dans l'isolement subi. L'entourage, c'est aussi important qu'un paquet de palets bretons.
  Et si j'étais maintenant le même, dans cette époque là, avec cette actu là, avec la même mère à éponger, le même père à détester, me répétant, je travaille pour ton avenir quand mon présent suait le pauvre, hurlerais-je plus fort encore contre l'hôpital sans moyens, l'école sans moyens, laïcité sélective, me ferais-je déboiter tout pareil par des musclés qui n'aiment pas lire, parce que mes tendons non développés, pompes en toiles, déconcentration ligne principale, éducation corporelle floue, ou parce que je ne sais pas ce que je fais encore là, mon rôle, mon but, mon ordre dans un monde désordre.
  Le début, le retard, le retour, lalala, l'histoire personnelle, les échecs personnels, l'absence de soutien ou le refus de soutien se mélangent, gros mots, c'est compliqué. La connaissance des codes sur le pont Napoléon un matin bondé, et la détestation de ces codes, pas le temps de parler, vite vite au boulot, ce qu'il faut dire, ce qu'il faut taire, les années d'errance et l'atelier boulet au pied, ne sachant pas quoi faire d'autre, parlant aux administrés qui ne comprennent pas qu'on aille mal, après tout, on fait ce qu'on aime, non ? Non. On ne fait pas toujours ce qu'on aime, on ne choisit pas toujours, on se laisse bercer, on fait ce qu'on peut même si on n'ose pas. Des regrets ? Bof. Le Yi-Jing est sage, plus sage que le sage et plus sage que moi. Il me dit dégage d'ici, rentre dans d'autres rangs, facilite lentement le départ vers un ailleurs aisé, embrasse une châtelaine, mets des bas pour le débat, déguise-toi en renarde, épile ton dos, mâche une gomme, fume un Schtroumpf.
  Cette aprèm dans le bureau du maire (mardi). Il a une toile du Général jeune qui devait appartenir au précédent mais qui est restée. C'est flippant. Des photos de ses gosses prêt de l'imprimante, tout le monde sourit. Un grand bureau avec dessus quatre range-documents noirs rectangulaires les uns à côté des autres. Les arrivées, les départs, les réglés à emporter, les en souffrance. Il ne connaît pas le studio Ghibli, j'ai cité Totoro, Mononoké, Chihiro, rien. Je fabrique des marionnettes, je veux fabriquer des marionnettes. Paul Klee en a fait pour ses gosses à une époque, et Calder un petit cirque, et Kveta Pacovska et son théâtre de minuit, non ? Vous connaissez le Muppet-Show ? Mon entretien est mal préparé. Il n'a pas d'écran dans son bureau, on a pas pu voir mon site Internet. Il a 74 ans, délègue-t-il pour les recherches ? Je le sens ailleurs. Loin. On parle de l'ancien Syndicat d'Initiatives, c'est pour ça que je suis venu, vingt mètres carrés au bas mot, plus salle d'eau, deux grandes vitrines. Combien le loyer ? Oh pas très cher. Oui mais combien ? J'ai pas très envie de refaire vivre un lieu dans un village qui a placé la député RN en tête. Fuir ou rester ? Partir en courant le portrait du général sous le bras ? Le maire parle parle, des choses qu'il fait pour la commune, des choses à faire, et pourquoi vous n'iriez pas dans ce petit local dégueu sans toilettes et sans arrivée d'eau. Vous pourriez demander quand il y a urgence à l'association artistique à côté. Sinon il y a les toilettes publiques plus bas. Personne ne s'en plaint. J'ai pas préparé cet entretien. Je prends des notes pour le prochain, ailleurs. L'idée que les vieux élus se font des artistes.
  En me repassant le film, comme je n'ai pas pu montrer de peintures, je sors des carnets, des frises, des dessins. Trop à la fois. Je ne le laisse pas prendre le temps sur les premiers. Brouillon je suis. Ah oui c'est pour les enfants, mais vous les vendez sur Internet vos travaux ? Non, je les vendais, mais là plus, je pourrais mais non, je fais des tas de choses, j'ai plein d'idées (je remarque en croisant les jambes que j'ai une tâche de soupe au potiron sur le bas de mon pantalon que j'essaie de gratter discrètement pour la faire partir) enfin, au fond de moi je sais que je ne fais pas grand chose, mais je tente d'y croire, le foyer où je réside n'est pas un espace de rebondissements créatifs, les animaux ronronnent, le chien fait oua oua. Je lui dit pas ça. S'intéresse t-il ? Oui. Un peu. Je ne sais pas. Combien le loyer ? Il me parle des gens qui ont appelé, comme si j'avais envie d'être en compétition, une boite de graphisme qui voulait un peu plus grand, je sens qu'il préfèrerait un truc de commerce. Il leur faudrait peut-être un peu plus d'espace, pour une photocopieuse, une grande imprimante. Vous m'aideriez à installer des étagères pour des caisses de rangements, je demande. Il ne répond pas. A t-il entendu ? A t-il des appareils audio ? Et il y a aussi une troisième boite qui voulait un bureau, ils ont trouvé l'info, ça s'est su, j'ai eu des appels. Mais ils ne sont pas passés. Il n'y a pas beaucoup d'endroits à louer, à moins qu'un particulier achète un bien et loue à des particuliers au rez-de-chaussé. Il me dit des choses que je sais déjà, je trouve l'entretien un peu long.
  Il me parle des bâtiments autour à vendre, de l'ancienne pharmacie du haut que personne ne loue, c'est un agent qui doit s'en occuper, il y a le téléphone sur la porte, ça allait se louer et puis non, et avant il y avait deux pharmacies, une en haut une en bas, mais la nouvelle est très bien et au dessus, il y aura des appartements, on en manque vous savez. Je m'en fous. Est-il heureux d'être maire ? Je ne sais pas. Dans cette grande salle, une autre toile peinte dans un coin à l'ombre, de moyen format, avec un hors bord vu de haut et la peinture qui imite bien l'écume de son sillon. Je trouve que cet espace pourrait être une salle de danse. C'est très vide.
  Son accueil était cordial, sincère, mais je ne sais pas très bien pourquoi je suis passé. Pour me présenter. Bon. Il a beaucoup parlé, qu'est-ce que je garde de cet échange, 200 euros de loyer ça ira ? Avec ou sans charges ? Il ne dit pas. Je n'ai pas visité le lieu, on verra début octobre, je vous rappellerais, c'est mieux d'avoir un locataire qui dure. J'ai plein d'idées mais mon cœur n'y est pas vraiment. En sortant je croise de gens que je connais un peu, sur la place, on parle météo.
  Un lieu qui m'accueille où je puisse écrire, inventer, avec de la lumière et du temps. Bon. Où qu'elle est ma résidence ?
(Ajout de 17h00, après le rendez-vous, je suis allé voir le syndicat d'initiative d'angle de rue passante/pas passante, vidé depuis peu, avec encore un tas de prospectus par terre, depuis dehors, en me penchant, pour vérifier pour la huitième fois comment c'était petit dedans. J'ai, un peu avant, trouvé trois livres dont vous êtes le héros dans la boite à livre cassée du village tout prêt du supermarket, ça m'a un peu remonté le moral).

lundi 23 septembre 2024

136.Kant on veut, pareil.

  Il n'est pas utile de venir et revenir sur Lavis Sauvage avec ferveur, ou fiévreur ou fierté je ne sais pas qui vous êtes, pour savoir si enfin un article est pondu, car l'on a soif de culture, de lumière et de chaleur noumène, comme disait Emmanuel Kant qui savait rigoler entre deux prises de tête (c'est lui qui a inventé la fameuse blague avec les petits singes en culottes à boutons). Je vais vous expliquer pourquoi ici-même, et entamer une étonnante conversion pendulaire au rythme fiable d'un homme constant aux talents versatiles qui se découvre à 49 ans bien tassés des vertèbres une vocation de régularité qui étonnerait ma mère, voire ma grand-mère (mon père il s'en fout).
  À chaque nouveau post, presque après publication, je le signale sur ma page Anje Lamatis Everest, mon profil privé public où je n'ai bloqué à ce jour que trois personnes, et encore, ce n'est que provisoire. Allez quatre. Bien sûr, il y a des provisoires qui durent et c'est embêtant, mais je peux vous assurer si vous paraphez là et là, et encore là merci, que vous ne perdez pas grand chose, je suis surfait et je ne poste plus de bêtises depuis quelques temps déjà, Je me concentre, j'infuse, la pluie tombe en vrac, je dors.
  J'ai arrêté les annonces immobilières débiles, n'en déplaise à Benjamin V. qui attend comme moi le déclic pour le fanzine qui va bien, condensé de hangars, de villas et de piscinables à souhait, je suis dessus. Mes photos de bandeau Facebook sont changées tous les six mois et ma tête de profil deux fois par an, ce qui veut dire la même chose mais ça semble plus lointain encore.
  Je pourrais, je devrais, je serais à même de tenir un engagement deux fois par semaine, disons le lundi et le jeudi soyons fous, aux alentours de dix-huit heures, soyons marteaux, qui permettrait de ne plus venir ici pour rien en se disant, ah zut, pas de nouveau post, mais qu'est-ce qu'il branle, il avait dit qu'il en ferait un par semaine, voire deux, le mardi et le dimanche, attends, non ça c'est pour les images sur son site, ah merde je sais plus, Janine, va me chercher l'agenda ! (j'ai un public mûr et racé qui a des habitudes propres). 
  C'est tout comme pour la vidéo du même nom, mais qu'est-ce qu'il branle ? Il avait dit une fois par semaine, il se prend pour la chanson du Dimanche ou quoi ? 
  Pour qui n'a pas accès à ma page Facebook publique/privée où l'on peut s'abonner quand même (ou suivre je ne sais plus) si je ne vous ajoute pas en ami, c'est parce que c'est comme cliquer sur des numéros pour dire si j'ai bien aimé la caissière et la propreté de l'échange, c'est terrifiant pour moi, ce monde est vil qui nous veut noteurs à étoiles des performances de gens dont le métier ingrat est de répondre à d'autres gens jouant les gens passablement agacés d'avoir été surtaxés quel scandale, pour appeler un numéro vert censément gratuit qui nous expliquait enfin comment adorer avec de l'encens et des petits biscuits langue de chatte, le président génial, et lui faire un petit temple japonais mimi dans son jardin, sur son balcon ou dans les chiottes si vraiment vous êtes réfractaires à ces vingts ans de règne qui arrivent sans faire de bruit, dans le feutré, à la hussarde mais avec des gants en peau de chamois dans ton cul. 
  J'ai parmi mes amis des morts/vivants qui ne postent plus rien mais dont on peut puiser le fond de pensée de leur vivant/vivant en descendant leur fil dans les profondeurs des stocks de bits de l'autre côté du miroir des choses qu'on aimerait cacher, mais qui nous suivent hou hou jusqu'à l'arrivée d'un empereur digital guidant enfin nos choix délicats et troubles de ce monde flottant, le mercredi et le samedi c'est possible aussi, vous me dîtes. Si encore ils postaient de l'au-delà, on s'amuserait, plus besoin de regarder des films horrifiques avec de vieux acteurs qui pensent encore nous épater alors qu'ils sont mous même au montage et c'est embêtant, il vaut mieux ne pas, comme disait le regretté Bartleby qui aurait pu tirer le Yi-Jing pour savoir s'il faut tourner à droite ou à droite, il aurait sans doute gagné du temps et profité de la vie qui s'envole, on aimerait tant la retenir par le suaire afin qu'elle tombe dans un bruit d'osselets cligueling boumbadaboum clang, c'était un chevalier teuton, et même peton. Sacré Emmanuel. Frapper des croques-morts à coups de pelle sinon, pour accompagner.
  Il y a encore les gens que je ne vois plus et qui regardent de temps en temps pour faire comme si, des gens que je pourrais voir mais que je ne verrais sans doute pas, des gens que je vais voir, mais qui ne postent rien sur Facebook et qui n'y vont plus. Des gens qui sont super actifs et qui ne mettent aucun like à rien à se demander s'ils s'intéressent à autre chose qu'à poster des trucs. On dirait moi. En plus j'ai même pas de chambre d'amis. 
  Honestly, vous devez être une vingtaine de vraies personnes à me lire, ce qui est à mes yeux énormissime, je ne sais pas comment vous remercier d'être les petits chiffres qui font vibrer mon compteur de statistiques et m'aident à tenir bon et recommencer à taper sur des bambous dans les soirées d'automne si fraîches qu'on en oublierait les chaleurs estivales qui ont cessé du jour au lendemain pour faire genre c'est fini les vacances il faut se remettre au boulot, que voulez-vous, il n'y a plus de saisons, on dirait la Bretagne sans les éclaircies sporadiques ou boulières, heureusement que l'essence a baissé. La réalité tangible, c'est surtout quand on se cogne à la hotte aspirante en se penchant sur le gaz.
  Un avantage à ne pas négliger, le lien vers ce blog est aussi sur mon site, en page d'accueil. c'est écrit en petit, en bleu, Quelques posts, ça permet de vous orienter électroniquement sans heurts, projeté dans les filets du ouèbe en ion positif galopant. Je n'aurais alors pas besoin de vous faire des grands signes sur un canot pourri qui prend l'eau au milieu d'un lac Suisse à la dérive sous l'orage avec un drapeau togolais délavé tenu à bouts de bras pour attirer votre attention (drapeau chouré à l'Epadh de mon vieux quand il râpait des carottes pour l'activité râpage de carottes pendant la semaine à thème Togo où on colorie le drapeau du Togo, c'est difficile) tandis que d'un slurp léger dans votre infusion bissap, postée au chaud devant la baie vitrée de l'hôtel grand luxe donnant sur la rive, avec un châle en mohair sur vos épaules, vous hésitez encore à alerter les secours. 
  Mary Shelley en a chié. Un bon titre de biographie.

jeudi 12 septembre 2024

135.Déstabiliser le processus.

  D'aucuns trouveront que parfois même en parlant, mon langage châtié de blogueur compulsif, rend perplexe, et je les comprends, je les cajole et les pouponne car, comme disait Robert Smith dans chacun de ses albums, il est malaisé d'entrer dans la tête d'un autre que soi-même et pourquoi ne puis-je être toi, hein ? Moi-même qui vous parle, c'est avec circonspection que j'embrasse le monde moderne, sans toujours arriver à saisir la finalité d'un grand magasin géant monté sur un parking non moins géant, avec des allées des allées des allées à n'en savoir que faire, où tout se trouve sauf de l'eau de Cologne Mont Saint-Michel, qui ne doit pas venir du Mont Saint-Michel mais des parfumeries d'Orléans, ce n'est pas mon sponsor mais j'y suis né et y serait peut-être un jour brûlé, car nul ne peut savoir ce qui l'attend au coin d'une conférence sur la reproduction des prêtres en milieu clos lors d'un conclave inopiné où les sujets fâchent et les anges passent.
  J'ai eu des bouffées de chaleur, je regardais dans un rayon, je ne trouvais pas, dans un autre, je ne trouvais pas non plus. Il y avait un gros monsieur avec une casquette et un T-Shirt, ce n'était pas facile de se concentrer, non pas que les gros monsieurs m'inquiètent, d'ailleurs on dit les gros messieurs. Regardez Raymond Devos, c'était un gros monsieur et il était plusieurs, on peut dire que c'était un pluriel singulier, si je l'avais croisé dans un super supermarché, je l'aurais directement abordé pour lui demander s'il savait où se trouvait l'eau de Cologne, peut-être en mettait-il lui aussi, c'était sa génération après tout, ils l'ont envahi, Cologne, c'est sans doute pour ça qu'elle est fabriquée au Mont Saint-Michel, ils ont dû trouver la recette, à Cologne. Bon.
  Il m'aurait sans doute dit que oui, il cherche aussi, et une autre personne serait arrivée dans le rayon et nous aurait demandé, vous ne sauriez pas si par hasard, au fil des étagères avec tous ces produits d'hygiène, il n'y aurait pas un peu de cette eau miraculeuse qu'on se frotte vigoureusement sur le dos avec les mains en arrière comme ça, et il nous aurait montré en faisant le geste, et Raymond Devos aurait répondu que lui, il demandait à sa femme, c'était le mieux, elle se mettait comme ça, sur son dos, car c'était une toute petit femme et il avait un énorme dos, et avec ses petits pieds, elle frictionnait, elle frictionnait jusqu'à ce que CLAC, comme dans le bain, j'en parlais dans la vidéo 146, je sais neuf minutes c'est un peu long, il faut faire un effort, mais j'ai fait un montage qui me semble bien achalandé, avec des coupures surprenantes qui permettent de rester dans le film pendant toute la vidéo. Où j'en étais ?
  Alors tous les trois on s'est mis à chercher dans les rayons, et on ne voyait rien, et on se demandait si il n'y avait pas de vendeuses, ou de vendeurs qui auraient pu nous éclairer, c'est tellement grand ici, six rayons rien que pour l'hygiène, deux pour les parfums et onguents de pieds, trois pour les savons, un pour les rasoirs et les mousses à blaireaux.
  Comme j'avais de plus en plus chaud et que la bande-son du spectacle était très techno forte (la caissière m'a dit, ah bon, ça vous dérange, c'est parce que vous êtes un homme, vous ne pouvez pas faire deux choses à la fois, et je lui ai répondu, non, c'est qu'il y a tellement de choses à gérer, entre les arrivées de stars sur le retour qui se font masser le dos avec les pieds par leurs petites femmes et l'absence de vendeuses ou de vendeurs, on s'y perd, et elle m'a regardé drôlement et elle a passé mes articles en se demandant si elle avait bien fait de prendre un dernier client alors que c'était fermé monsieur, il faut aller sur la caisse 8, mais la caisse 8 est remplie à ras bord et je n'ai que quatre articles, bon alors passez passez, mais mettez un petit panneau caisse fermée pour pas que quelqu'un subrepticement vienne se loger dans la file et me mange mon temps de pause qui est déjà bien rikiki, et c'est amusant, rikiki c'est le même nom que cet acteur néo-zélandais qui a joué Hitler dans Jojo Rabbit et qui va tourner l'Incal, vous savez cette BD de Jodorowsky, au scénario, parce que le dessinateur c'était Mœbius, Jean Giraud, oui, le lieutenant Blueberry, le garage hermétique tout ça) je suis allé à l'accueil pour me complaindre, et je suis tombé sur une dame qui m'a dit qu'elle n'était pas là depuis longtemps et qu'elle ne savait pas.
  Après avoir payé mes articles, la caissière m'a dit, mais vous devriez aller à la parapharmacie, c'est juste là, et juste là je retombe sur ma dame qui n'était pas là depuis longtemps et qui m'a dit, ah oui j'en ai, mais ce n'est pas pour la friction, ce sont des bouteilles un peu luxueuses, plutôt parfum de fête, vous devriez aller voir dans un plus petit supermarché, c'est la marque Saint-Michel des parfumeries d'Orléans.
  J'ai dit merci Raymond. Elle m'a regardé bizarrement.