vendredi 17 mai 2024

116.Gagner des médailles.

   Être un héros des années 80 dans sa tête n'est pas une mince affaire pour réussir dans la vie. Je vois mes journées en séquences de film, avec les passages faciles et cools et ceux compliqués où le héros va avoir maille à départir (on dit à partir ou à départir ?) avec les autres héros partout autour, même si personne ne se rend compte que c'est l'architecture du bâtiment et la géographie du terrain qui donne le sens à l'histoire et dirigent véritablement le récit. Quand créera-t-on une palme d'interprétation pour la forêt dans laquelle on tourne ?
  Je suis happé comme tout un chacal par les marqueurs de la vie française. Les vacances de Pâques, les congés pas payés, les ponts, Roland Garros, Cannes, les Molières, Avignon, la coupe de l'UEFA, les scandales quotidiens des imbéciles harceleurs et tordus qui pensaient vieillir aussi tranquilles que Franco.
  L'amour et l'amitié sont les choses les plus valables dans une journée sans what's app. Je voudrais pouvoir devenir l'image que je crois être depuis toujours, un Michel Drucker sans la télé, capable de rester copain avec tout le monde sans faire de vagues et d'inviter à la même table des gens de tous les bords pour rigoler aux blagues d'un imitateur de droite qui habite dans un château. Après il y aura peut-être des révélations sur Michel Drucker, cela serait dévastateur car nous n'aurions plus aucuns repères et le monde sombrerait dans le chaos. Bon, le monde est déjà dans le chaos, c'est pas très grave alors.
  La reconnaissance c'est important, d'où les marqueurs. Les marqueurs c'est un peu comme les récompenses, je me sens content de voir que je suis allé jusqu'au bout de cet événement qui vient, quand la pleine lune ou les règles de ma copine sont passées, je peux enfin me mettre à faire des crêpes. La douceur est nécessaire pour l'obtention du baccalauréat, que je n'ai pas je le répète, non que ce soit une marque de fierté, je m'obsède de ce passage raté, et heureusement que j'ai eu mon permis de conduire du premier coup après l'orage à quarante six ans passés, comme mon certificat de fin de stage doublée d'une auto-autorisation de sortie aux Beaux-Arts où je commençais à faire du Jean-Martial et pas du tout du (mettre ici le nom de l'enseignant qui prenait la place de l'enseignant qui prenait la place de celui qui voulait qu'on fasse comme lui mais sans le dire vraiment parce que c'est ce qui se passe partout tout le temps mais il ne faut pas le dire c'est un secret ) et ça plaisait moins à (mettre ici le nom de l'enseignant qui prenait la place de l'enseignant qui prenait la place de celui qui voulait qu'on fasse comme lui mais sans le dire vraiment parce que c'est ce qui se passe partout tout le temps mais il ne faut pas le dire c'est un secret ) ce qui est fâcheux car j'aime bien (mettre ici le nom de l'enseignant qui prenait la place de l'enseignant qui prenait la place de celui qui voulait qu'on fasse comme lui mais sans le dire vraiment parce que c'est ce qui se passe partout tout le temps mais il ne faut pas le dire c'est un secret )
  J'avais sur-aimé son travail avant d'entrer à l'école et tenté maladroitement de faire comme lui fort consciemment pour plaire et comme un test en me disant, on va voir s'il se rend compte que je le singe, et c'était passé, on m'avait félicité en me disant bravo c'est super, c'est original, et je trouvais que ce que j'avais fait alors était super chiant et tout à fait banal et prêt à entrer dans une galerie qui ne fait pas de vagues et tout le monde est un artiste youpi tralalala. Et puis j'ai arrêté, et c'est plus passé, on m'a fait les gros yeux, on s'est scandalisé sans aimer ma poésie, on a dit mais qu'est-ce que tu fais voyons, on ne t'a pas demandé d'être original, il faudra attendre tes soixante ans pour ça. J'oubliais que je n'étais pas un grand avec des muscles. Les muscles permettent souvent de donner du corps aux arguments face à des imbéciles hautains qui pensent savoir mieux que toi ce que c'est qu'inventer sa vie avec des formes neuves.
 Peut-être que si j'avais eu un foyer aimant et soutenant je n'aurais pas claqué la porte et écouté mon regretté ami Claude qui m'encourageait à passer au dessus du mépris pour reprendre confiance et montrer des trucs un peu nuls le temps du diplôme pour plaire à tout le monde, j'en sais rien.
  Obtenir son histoire en diplôme, voilà qui serait fort, je vois déjà la cérémonie proche du monument aux pierres (oui, un monument aux pierres fait en parpaings, pas loin du monument aux oiseaux, fait en paille) : "Vous vivant, vous avez des illusions, bravo, c'est un succès, je vous donne le droit de vivre encore et de rechercher le bonheur dans votre quotidien, c'est tout ce qui compte, soyez heureux, tentez de l'être, le maire psychologue vous accueille le lundi et mardi entre 9h00 et 12h00 avec un café et des croissants pour parler du PLU et de votre maman.", et le président de la forêt jouerait de la scie musicale avec les biches et les lapins dans un rayon de soleil bien placé avec la gentille quiche en robe à fleurs qui sourit pour la photo. 
  On va encore me dire que je suis pour le patriarcat. C'est le problème des années 80. Tu regardes le film Association de malfaiteurs de Claude Zidi, tu comprends. Les hommes d'affaires sont des brutes épaisses qui prennent les femmes comme des haltères, plus on force, plus on devient musclé. Il n'y a pas beaucoup de salles de sports dans les exploitation de gavages d'oies par ici.
 
 

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