jeudi 16 avril 2015

26.La belle reprise.

  Rouler le matin dans la zone pavillonnaire, à vélo, au milieu des gens rapides et pressés. Combien de gens prennent encore le temps de prendre du plaisir à faire ce trajet ? Maison-travail-maison. Vite vite. Pas le temps de flâner. Parfois, ils me frôlent, et quand c'est vraiment limite je leur fais des doigts. Pourtant pas l'habitude de chercher des noises mais bon. Une fois un con à pilé dans un virage, il est sorti de sa voiture pour se battre. D'autres voitures arrivaient derrière, l'un a klaxonné. Pas le temps de se battre. Je suis descendu de mon vélo, j'ai posé mon vélo dans l'herbe et je me suis mis en position de combat. Les deux mains ouvertes devant moi, la droite à hauteur du visage, la gauche à hauteur de mes couilles, prêt à en découdre, même si je sentais que j'allais me faire ratatiner si un vrai conflit se mettait en place. J'ai pas bougé. Le type m'a insulté, est remonté dans sa voiture. La file a pu se remettre à rouler. Il avait failli me renverser, j'aurais dû rester poli, pardon pardon, je ne voulais pas te dire d'aller te faire foutre, sale con qui roule comme un manche. Combien de tarés en voiture aujourd'hui ? Pas le temps, pas le temps. Je fais très attention. Parfois ils arrivent si vite et ne respectent aucun céder-le-passage. Plus vite plus vite. Devant le carrefour en sortant de l'impasse, ça fait deux fois que je vois les gendarmes réglant un gros boum. Je ne suis là que depuis décembre. Ce matin j'ai pris mon vélo à la main sur la première partie du trajet. Je le pousse sur le trottoir. Quand il est tôt, je préfère. Les ceux qui vont au travail foncent. Il y en a toujours un qui est plus impatient que les autres et qui double trois voitures de suite sans grande visibilité. Je n'ai pas le temps, je suis pressé moi, j'ai des choses à faire. La vie passe et on ne regarde rien autour de soi. En deux semaines, les arbres ont explosé de bourgeons prometteurs à feuilles vertes pomme. Hier soir en rentrant très tard, sur une route déserte, j'ai passé une vingtaine de minutes à sauver des escargots suicidaires qui voulait traverser pour voir en face si il y étaient. Je voudrais bien que mon gros chat ne me réveille pas à six heures pour ses croquettes, mais je crois que ce n'est pas possible.

mercredi 1 avril 2015

25.Sassafras

  Vie de peinture. Dans les branches des arbres, mes yeux. Il y a sur le chemin que je prends pour aller à l'atelier, un arbre grand et fort tordu par le vent, comme s'il dansait. Je n'ai pas encore réussi à le prendre en photo, ce n'est pas qu'il ne se laisse pas prendre, mais je le laisse danser encore un peu pour trouver le bon moment. J'ai commencé beaucoup de carnets non terminés ces mois-ci. Notes narcissiques, ébauches de spectacles, désirs d'ordre dans ma tête, plans de travail jamais suivis, calendriers obsessionnels, grilles. Contrairement à ce que disait Débo dans le last post, je n'ai pas écrit cinq livres et douze pièces. Mais j'y aspire. Bon douze pièces peut-être, mais il y a un peu de réécriture avant d'éditer chez La Pleïade. Je ne renonce pas beaucoup à mes rêves, c'est ce qui me pousse vers le mieux. L'histoire de M2M comme je l'appelle est bien bâtie, elle est un roman d'aventure jeunesse en 4 à 9 livres. C'est variable. Même si pour l'instant je n'en vois qu'un seul. Un roman d'aventure et d'initiation je t'en dis plus quand j'ai fini, again. Je puise dans les bonnes recettes. Cette folie de vouloir écrire et faire des tas de choses quand je sais bien que je vais lentement. Il faudrait plusieurs vies me dit-on dans l'oreillette. Je ne crois pas. Il suffit d'être très concentré, ça ne va pas forcément plus vite mais ça construit la confiance en soi. Si j'ai envie de maîtriser tant de choses, ou de jouer avec tant de choses, la maîtrise n'est que le start, de pratiquer tant de choses, c'est que oui. J'ai trouvé un équilibre dans la projection de la pratique plutôt que la pratique. Remettre à demain tout en rêvant aujourd'hui. C'est une bizarrerie artistique, car pourtant je travaille beaucoup, je pratique beaucoup, et je ne pratique pas grand chose. Une nouveauté vient de cette envie de s'écouter comme j'écoute autour de moi, je regarde. Le temps passe et je ne suis pas inquiet pour le temps. L'inquiétude est dans quoi d'ailleurs ? C'est idiot, éculé, mais je sens que je me prépare depuis longtemps à sentir comme je sens, à vivre avec ce regard à la fois vague et précis. Je sais que je suis un monde, que tout le monde autour l'est quand ils veulent bien sentir l'air de l'espace, et cela me donne une confiance inouïe dans l'instant. Je ne dis pas que c'est simple, et je suis toujours le premier à me moquer des ceux qui parlent de l'indéfinissable, mais voilà. Je garde confiance dans l'anarchie libertaire et le laisser aller bosseur et constructif. Au fond, je suis un saumon.