mardi 21 janvier 2020

82.LCDçVM 7 : Dessiner, enseigner, peindre.

  Dessiner c'est remettre en question ce qu'on a sous les yeux. C'est pas avec des mots, c'est pas un débat. Pour celui qui dessine, c'est surtout une pensée de la main. 
  Enseigner, c'est une autre paire de manches (propres les manches). La main veut l'esprit, l'esprit veut que la main soit sienne, et ça se bat, et c'est raté. Le raté m'intéresse, le beau parfait qu'on croit parfait aussi. 
  Peindre me permet de relier. En faisant de la peinture, je peux rater lentement et reprendre, je recouche, je repasse les couches et j'apprends à enseigner. 
  Dessiner est un spectacle de la main (ou du pied ou de la bouche si on a pas de main, me faites pas passer pour un (homme, femme) politique qui dit cher et chère alors que, en français, le masculin peut dans un discours englober les deux genres, oui oui, et chers concitoyens suffit). 
  Dessiner demande de la consentration (car consentir à la concentration est important) et un petit peu de souplesse. On veut atteindre un bon niveau de pratique et pouvoir dessiner n'importe quoi, mais on a du mal a accepter que n'importe quoi est aussi dessinable, et qu'un dessin raté a autant de valeur et peut autant s'encadrer qu'un autre. La preuve les dessins des gosses posés avec des magnets sur le frigo. Mais c'est des gosses on me dit dans l'oreillette, et je réponds oui, et nous sommes des gens sérieux, nous aimons les scènes de chasse bucoliques et les arbres ressemblants. 
  Pourtant, il y a toujours, j'y aspire et je l'espère, un moyen de rassembler le dessin raté et le dessin parfait, pour soi et aux yeux des autres. C'est un tour de magie nécessitant (cessant l'hésitant) chocolat et paroles rondes. 
  Je tente de dire depuis le début, avec maladresse ou simplicité, que la voie du dessin, ou de la peinture, est un enseignement qui se rejoint du laid au beau et du beau au laid, c'est nouveau, il fallait l'inventer. Cela se crée dans un temps lent qui n'a pas la vitesse de connexion d'une maison à pieds de poule.
  La main ira alors rejoindre l'esprit et pourra contenter à la fois les attentes des puristes de la reproduction qu'on croit parfaite, et les démons de l'imaginaire qu'on veut contrôler en continu. Et l'on pourra en fin d'année scolaire, semestrielle ou lunaire, décider que oui, ce à la manière de est tout aussi créatif, constructif, formateur que ce exactement comme, pour enfin peut-être après des années de judo, décider que regarder le monde est la plus pure manière de le dessiner parfaitement.