samedi 17 octobre 2015

35.On va bien se narrer.

  Les semaines se poussent, comme des plantes. J'en ai une qui était à l'atelier et qui à la maison maintenant fait un peu la gueule, c'est Grégo qui me l'avait amenée pour un anniversaire tardif. Je t'avais pas dit mais je suis à la campagne, enfin, c'est pas parfait, mais y'a du soleil si tu vas le chercher chez les voisins en montant sur les petites marches en hiver. faudrait un poêle à bois. Je regarde toutes les petites histoires en jachère qui font des piles de livres à venir, merveilles. Je t'ai pas beaucoup donné de nouvelles simples, je m'amuse souvent à diverger. Et les vergers en fleurs sont si beaux au printemps. 
  L'aventure de mon existence est liée à la tienne, que tu pollues ou non. Je vis grâce à toi depuis toujours. J'arrive à déconnecter mon cerveau des problèmes (après les avoir traités un à un, of course) en laissant venir le grand vide, et je souris dans le camion. Le désir de monter une compagnie de spectacle est toujours aussi violent en moi, puissant, continu, organisé, planifié, je sais que ça m'arrivera, et si ça n'arrive pas, ce n'est pas grave, parce que je vais y arriver. N'étant pas le vieux sage à qui l'on vient demander conseils et histoires, restant le jeune sot sous son arbre mouillé dans la rosée du matin (les images varient, hier j'étais une femme du 13eme) je t'appelle encore et encore et encore. J'ai soif de savoir ce que tu deviens et si tu as une caméra.
  Pour mémoire, je te donne mon parcours en tentant d'être clair. J'ai commencé tôt à me déguiser, malle aux costumes. On venait faire le défilé dans la maison et les adultes étaient compatissants, bien que participant peu. Le pâtisson est un légume oublié qui a goût de je ne sais plus quoi au juste, mais la forme est marrante. Ensuite maman allait moins bien et le rire est parti faire un tour au bar, papa a voulu serrer la vis alors qu'il n'y en avait pas. Heureusement il y avait les fils du Dieu Noir, soirées pas mondaines de héros dans la maison pour tous. L'adolescence m'a vu me blinder contre toute forme de simplicité, croyant bien faire en me faisant excentrique, colère ou drôle ou les deux. Les familles d'amis se construisaient et déconstruisaient au gré du vent. 
  Arrivé en Aquitaine, j'ai réuni un maximum de monde, croyant que j'étais déjà prêt. Mais comment suivre quelqu'un qui ne s'aime pas vraiment, se livre si peu et mélange toutes les colères ? Planning planning planning. Amour gloire et beauté, désir choucroute et falafels ? Puis les serpentins me sont tombés dessus en quelques clics, j'ai compris que je n'étais pas seul à faire le bizarre. J'ai aperçu les levers de soleil de la vie qui clignotent en épisodes de Simpsons. Je me suis souvenu de tous les petites détails qui font qu'on peut se déclarer sa flamme en évitant de se brûler les doigts, et j'ai hérité de deux chats gentils et d'une femme qui est plus simple que moi pendant trois semaines par mois. 
  Je pense aux Deschiens, au théâtre du Soleil (ou de l'épée de bois), à tous les marionnettistes (TOUS), les bons et les mauvais, qui apportent du fil à notre retour des enfers. Et puis j'ai cessé de me dire que je pouvais réunir le monde en provoquant les rencontres. Je me suis mis à me polir comme un caillou, et penser à une stratégie du retour, un story-telling qui te permette de participer à mon stage sans préinscription. Nous allons nous revoir, à un moment donné, c'est sûr, un instant T, un temps X, ici ou là-bas, un petit souffle peut-être, je m'en moque. Serons-nous pas très à l'aise ou oui ? Ce sera simple et nous applaudirons. On se moquera des ceux qui ne croient pas à la résurrection des courges.

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