lundi 22 avril 2019

78.LCDçVM 3 : Cheveux en quatre.

  Si j'ai envie d'avoir un petit peu plus de voix dans le poste, ou un poste avec ma voix dedans, ce n'est pas pour dénoncer que le parti va mal et que les décisions ne sont pas prises ensemble pour décider s'il faut une machine à snacks à côté de la machine à café, c'est juste pour chanter mieux. 
  Faire des trilles et composer des rimes intrigantes, mais pas trop parce que sinon ça fait poésie et franchement personne n'aime ça. Trouver un sens à sa vie en tordant les mots pour en faire des qui n'étaient pas encore là avant, qui est-ce que ça intéresse aujourd'hui ? Ce qu'on veut c'est des écrans plats géants et une plus grosse voiture pour écraser les champignons. 
  Gonfler son chant, poser des bombes.
  Par bombes, je pense à celles qui font des trous dans la tête, sans occasionner aucune blessure psychique ou corporelle. Anselm Kiefer, que je kiffe et qui est mon ami, pourrait vous en parler, lui qui fait des trous en superposant les couches. Ce n'est pas une assistante maternelle mais bien un peintre, et certaines de ses fortes grandes toiles proposent au spectateur de laisser tomber sa journée programmée, pour rester assis trois heures devant des images aussi belles qu'un bon texte qui nous fait quelques instants oublier les fracas inutiles du monde du travail, qui préfère péter une forêt sur deux kilomètres et virer les vaches des champs libres pour le rêve du matin en bus (et quelques maisons) et construire une quatre voies parce que ça permettra de désengorger les solitaires qui vont au bureau tout seuls dans leur véhicule hybride qui prennent personne en stop, qu'ils finiront de payer quand tout aura repoussé après le grand cataclysme. Et on pose sa main sur le cœur en disant cette voie sera pour les transports en commun et le covoiturage. J'irais voter quand les chevreuils seront sur les listes. Réinsérons le loup dans les mairies.
  J'ai quatre idées en tête en permanence (faut vraiment que j'arrête avec les listes, mais rassurez-vous, c'est juste pour meubler et faire mon intéressant, je change d'avis toutes les heures) elles se découpent comme un fromage d'un Trivial Pursuit™ plus facile, ou comme un lézard d'Australie, forcément, grillé sur feu de bois, lors d'une soirée top délire entre aborigènes bourrés au vent des boomerangs.
  La première c'est la peinture, ok, on a compris, le mec peint, pas assez souvent pour être honnête, mais quand il s'y met, il parle de lui à la troisième personne du singulier pour éviter les malentendus avec ses trois autres activités mentales. 
  La peinture magie plastique, paresse ultime du grand enfant qui ne veut pas quitter le fond de la classe à côté du chauffage, et qui semble calme quand on ne lui retire pas ses pinceaux. À la maison il dort dans la petite pièce sous l'escalier, avec la litière des chats, et on lui jette des restes de chou pour garder l'aide publique des débiles légers. 
  Pour peindre il me faut cet atelier froid, et ce classement inutile de formats et de formes pour me faire croire qu'il y a un sens à cet enchevêtrement de figures.
  Je ne suis pas certain d'être peintre. Enfin, je suis pas que peintre, ça c'est sûr, mais me plonger entièrement dans cette activité, j'hésite. Quand je dirais j'hérite je changerais peut-être d'avis, et je collectionnerais les pianos les uns sur les autres comme le faisait Satie, qui était mon ami, en me consacrant à la musique malgré l'âge de l'arthrite.  
  En deux, vient l'image, toute l'image, de la photo au crobart, de la liste de course gribouillée au carnet sérieux, quoique je n'ai pas beaucoup de carnets sérieux vu que je remplis toujours un peu dans le désordre et que les idées sont des marabouts d'ficelle de ch'val sans cesse. Je veux dire que chaque fois que je nomme un carnet pour lui signifier de rester dans une thématique, en général il n'est pas d'accord et donne à ma main la place pour autre chose. L'image est partie prenante de mon quotidien, tout est inspirant, et si je le sens pas, je n'appuies pas sur le bouton de rose.
  En trois vient l'écriture, celle qui m'appelle chaque fois que j'ai au moins quatre heures devant moi, le temps de s'y mettre, le temps d'aligner des mots, le temps de corriger les choses inutiles. Parfois j'y reviens la nuit quand je me réveille. J'en profite pour mettre mon chat dehors par catapulte et aller faire pipi.
  En quatre vient le spectacle, les spectacles, que j'ai laissé de côté pendant plein d'années parce que je ne savais pas quoi dire, ou plutôt comment dire, ou plutôt je suis un gros manche pas capable d'aligner deux projets sérieux et de réunir du blé, de la concentration et la bande à Basile pour faire la chenille qui redémarre. J'ai quatre projets pour mon projet quatre. 
  1.Un tour de chant musique avec album et clips noirs et blancs qui se la pètent et tournée internationale à l'atelier. 
  2.Une série télé pour les moins de cinquante ans et les plus de soixante (la dizaine intermédiaire ira au foot), avec des monstres, pleiiin de monstres, mais pas qui font peur, ou alors un peu mais sympas quand même, genre qui rangent la vaisselle après avoir pété un mur et craché trois gros mots. 
  3.Un solo de rire pour faire rire, avec ou sans nez rouge, mais je ferais passer ça pour un seul en scène pour pas me mettre en compétition avec les comiques et tenter de me faire une place dans les soirées couscous de l'amicale des chasseurs de la salle de fêtes de Luçon. Pourquoi Luçon ? Parce que c'est un riche lieu, merci bonsoir. 
  4.Un cirque avec des marionnettes et des comédiens et plein de tours de pistes qui ratent.
  Et pour le succès, je veux dire celui que je vis au quotidien, il commence à sérieusement me gonfler pour aller chercher le pain complet chez l'Éthiopien hirsute, cette nouvelle mode des autographes au beurre de karité me coûte cher en noix de coco. J'espère que la tempête sera assez forte pour m'emmener voir le magicien d'Oz, il aura des questions à mes réponses.

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